Corpus Essonnien

Histoire et patrimoine du département de l'Essonne

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Le fief de Fretay (3)

Chronique du Vieux Marcoussy –Marcoussis————— _——————————- Décembre 2008

Extrait du Plan terrier de Nozay

JP. Dagnot

C. Julien

C'est la troisième partie de la chronique consacrée aux fiefs de Fretay (com. Villejust, Essonne). Nous avions traité des trois fiefs de Fretay qui était respectivement dans la mouvance de Marcoussis, celle d'Orsay et celle du Plessis-Pâté (1). Au XVIe siècle, ce dernier devient un arrière-fief du Plessis puisque Fretay relevait en partie du seigneur de Leuville.

Fretay dans la mouvance de Leuville

Le 8 avril 1600, le seigneur de Fretay présente ses devoirs féodaux à son suzerain « hault et puissant seigneur Messire Jehan Olivier, chevalier, gentilhomme ordinaire de la chambre du Roy, baron de la Rivière, seigneur de Villemarêchal,… et Fretay » (2). Le seigneur de Leuville se transporte pour porter les foy et hommage et serment de fidélité à Messire Louis de Montbron seigneur du Plessis-Pasté assis en la paroisse de Villejust (3).

Quelques semaines plus tard, la déclaration d'aveu et dénombrement du fief de Fretay est faite par messire Jehan Olivier. Le seigneur de Leuville « advoue tenir en une seule foy et hommage de Loys de Montbron, seigneur du Plessis Pasté ». Le fief vient de la succession de feu Jehan Olivier son père qui se consiste en « ung hameau appelé Fretay situé en la paroisse de Villejust où il y a plusieurs maisons et masures, cours et jardins, le tout contenant ensemble trois ou quatre arpens ou environ, tenant au fief de Marcoussis, d'autre au fief de Sainte-Catherine du Val des Escolliers ». L'acte précise que le fief contient « neuf arpens et demy avec la maison de Michel Desforges …. et autres terres ».

En 1618, “Messire Jehan Ollivier, chevallier, gentilhomme ordinaire de la chambre du Roy, baron du Homet et la Rivière, seigneur de Leuville confesse avoir baillé à titre de ferme par an jusqu'à six ans, à Monsieur Jehan Lemaire, son receveur au dit Leuville, les cens et rentes, saisines et amendes, des acquisitions des droits que tient ledit seigneur sur Leuville, Fretay et la Poitevine; sont également compris les proufits de la justice de Leuville, deffaults & amendes, les droits de foirage & de rouage enfin le collombier dudit Leuville” …

L'année suivante, la terre du Plessis-Pâté fut vendue par Jean de Montbron, l'héritier des Blosset, à Geoffroy de Laigue, conseiller d'État. C'est pour lui que la terre du Plessis fut érigée en baronnie par décret du 26 juillet 1657. Après Monsieur de Laigue, Le Plessis revint à Jean le Picard, qui appartenait à la noblesse de robe ; puis François d'Argouges, conseiller d'État et premier président du Parlement de Bretagne. La terre du Plessis-Pâté, devenue le Plessis-d'Argouges, ne resta pas longtemps dans les mains de Suzanne d'Argouges, marquise de Bournezeau, qui, le 24 mai 1709, la vendit à Charles Louis Kadot, marquis de Sebbeville.

Une quittance de cinq années des 12 livres de rentes sur les héritages du fief de Fretay est signée en juin1645. Puis, Messire Olivier, seigneur de Leuville se présente le 2 novembre 1657 « au devant de la grande porte du chasteau du Plessis-Pasté, paroisse St Pierre à Brétigny pour se rendre en estant vassal », et présenter « les foy hommage et serment de fidélité à cause et pour raison dudit fief de Frettay au seigneur dudit lieu, …, son fief de Fretay par luy tenu en plain fief foy et hommage », à Messire Geoffroy de Laigue « seigneur du Plessis-Pasté, partie seigneur de Bondoufle à sçavoir du fief de Fontaine à Brétigny et Montpipeau ». Louis Olivier déclare que son fief de Fretay vient de la succession de « feu Messire Jehan Ollivier son père vivant aussy chevalier et conseiller de la chambre du Roy ». Le sieur de Leuville est prié de faire « son adveu et dénombrement dudit fief de Frettay » comme requis par la coutume.

En 1675, Monsieur de Louvain « escuyer, sieur de Villarceaux » passe aveu et dénombrement pour ses terres de Villevent et Fretay. Le 7 août, il déclare posséder neuf arpents faisant la plus grande partie sise au territoire de Fretay, chantier de l'Orme Couronné, dont il faut donner une reconnaissance à Madame de Leuville, en raison d'une sentence du Châtelet.

Une sentence du Châtelet est rendue le 5 septembre 1675 au profit de Monsieur de Leuville contre Jean et Pierre Arsac, Jacques Duval, Come Rousseau qui sont condamnés « lesdits personnellement et hypotéquairement pour tout payer les 12 livres de cens et rentes ». La sentence définitive du Châtelet du 2 septembre 1682, sur un gros procès par laquelle Madame de Leuville a perdu « ladite rente de douze livres contre la veuve dudit Duval avec despens qui possède une partie des héritages du fief de Fretay, la dite veuve ayant été déchargée de ladite rente attendu que l'on a jugé qu'il y avoit prescription à son égard pour ladite rente seulement et pour les cens elle est condamnée de les payer aussy bien que ceux des héritages de 6 livres à la Poitevine ».

En janvier 1692, la baronnie du Plessis change encore une fois de propriétaire et Anne Morant, marquise de Leuville, veuve Louis Olivier, rend foi et hommage à Messire François d'Argouge à cause de sa baronnie du Plessis.

Le bail de la ferme de Fretay est passé le 12 décembre 1714 par Chevalier à Famechon devant Blondeau. Jacques Chevallier, laboureur demeurant à Villejust, Charles Goix aussi laboureur et Bernard Chevallier aussy laboureur, lesquels baillent à loyer pour six ans, à Henri Famechon, laboureur de Fretay, c'est à savoir la ferme et bâtiment, logement, terres, labourables audit lieu de Fretay soit 60 arpents , moyennant 220 livres. Quatre ans plus tard, Bernard Chevallier, laboureur demeurant en la ferme de Villiers, résilie le bail de la ferme de Fretay, fait par Famechon devant Blondeau en 1714, pour lequel il reste six années moyennant 148 livres de dédommagement prétendu par « lesdits louages ».

Foi et hommage de Louis Olivier de Leuville au seigneur du Plessis-Pâté.

Etant devenu seigneur du Plessis-Sebbeville en 1709, Charles Kadot reçoit le 12 novembre 1718, la foi et hommage de Messire Louis Olivier. Le comte de Sebbeville était enseigne aux mousquetaires et brigadier des armées du roi. Il était marié à Elisabeth Thérèse Marguerite Chevalier qui deviendra plus tard la comtesse d'Esclignac. En voici une expédition « Foy et hommage passé devant Hermier, notaire royal à Montlhéry, faite par Messire Louis Thomas Olivier, marquis de Leuville, seigneur du fief de Fretay et autres lieux, à Messire Chales Louis Kadot, seigneur du Plessis et autres lieux, pour raison du fief de Fretay, tenu en plein fief foy et hommage dudit seigneur à cause de sa baronnie du Plessis, à laquelle foy et hommage ledit seigneur de Fretay a été reçu à la charge de donner son aveu et dénombrement dans le terme de la coutume ». On peut remarquer une situation cocasse de l'Ancien régime : un marquis vassal d'un baron !

Un accord est signé le 6 novembre 1730 entre le marquis de Leuville et Alexandre de Balsac sur le fief de Fretay. La minute décrit que la transaction comporte « masures et deux cents arpents ». Le marquis vend la moitié dudit fief au seigneur de Marcoussis avec la précision que le fief relève du seigneur de Plessis-Pâté. On comprend par cette vente que la complexité et l'enchevêtrement des droits féodaux sont sources de procès. Le puissant seigneur de Marcoussis devient le vassal du Plessis-Pâté alors qu'il possède par ailleurs la mouvance de l'autre fief de Fretay.

Les fiefs de Fretay sous la comtesse d'Esclignac

La comtesse de Sebbeville devient veuve en 1734 et la maîtresse de la seigneurie du Plessis jusqu'à son second mariage avec Charles Louis de Preissac, comte d'Esclignac, le 13 juin 1752. Un an auparavant, elle avait acheté la seigneurie de Marcoussis au marquis de Rieux (4). La nouvelle comtesse d'Esclignac était une femme de caractère et réunissait donc les seigneuries de Marcoussis et du Plessis, ce qui allait simplifier les affaires à Fretay.

En octobre 1771, la comtesse d'Esclignac et Charles de Preissac, demeurant en leur château du Plessis, baillent à cens une masure à Fretay où il ne reste actuellement qu'une mauvaise goutte et un pignon sans couverture contenant 34 perches moyennant 10 livres de cens perpétuel et annuel ; le paiement aura lieu au château de Marcoussis lieu de la recette ordinaire. Les preneurs s'obligent à construire à neuf un nouveau bâtiment.

En 1782, Michel Boudinet, « héritier de terre où soulloit un moulin à vent » déclare un bail à cens et rente pour: - une maison, chambre basse à feu, cour et puits dedans à l'entrée de Fretay, - demi arpent au chantier du moulin à vent, autre demi arpent au même chantier tenant à Thomas Boudinet, au chemin de st Clerc à Montlhéry, à l'est à la jonction du chemin du moulin à vent au carrefour de Viviers. Ces biens viennent du partage fait avec ses cohéritiers de la succession de Thomas Boudinet, son père.

Au mois de juin 1783, les seigneurs des environs refont leur terrier, et pour faire cesser les hostilités entre eux, ils effectuent le bornage des seigneuries de Fretay, la Poitevine , Villejust, Villarceau, Villebon et les petits fiefs concernés. Les “papiers à terrier”, comme on disait, étaient les documents ainsi que les déclarations des baux à cens et rente des fiefs de Fretay et la Poitevine ; ils permettaient de localiser les propriétaires et leurs biens, mais aussi de localiser les limites des différents fiefs et leur mouvance. Ainsi, nous trouvons tous les seigneurs ou leur représentant : Nicolas Ledur, commissaire aux droits seigneuriaux représentant la comtesse d'Esclignac, pour les fiefs de Fretay et la Poitevine , sieur Didier Ladey, feudiste et notaire au baillage de Marcoussis, représentant dame Marie Madeleine Bégé dame de Villarceau, et ses cinq enfants, sieur Joseph Lacorne, régisseur de la terre et seigneurie de Villebon, représentant la veuve Pracontal, dame de Villebon et du fief de la Saussaye , enfin Messire Benoist de Montessuy, écuyer, seigneur de Villejust.

En 1786, sur l'état et dénombrement du fief de Fretay, sis en la paroisse, haute, moyenne et basse justice de Villejust, le commissaire à terrier de la comtesse d'Esclignac dame dudit fief, porte une mention surprenante « pour tenir lieu d'aveu et dénombrement et acte de service dudit fief à la baronnie du Plessis, appartenant également à la madame la comtesse, lequel fief consiste en cens et rentes à prendre sur plusieurs maisons et héritages le tout contenant 208 arpents possédés par divers censitaires ». Le commissaire voudrait nous faire croire que Madame le comtesse rend foi et hommage à elle-même pour son fief de Fretay mouvant du Plessis.

Le 3 juillet 1786, Nicolas Le Dure, commissaire aux droits seigneuriaux, fondé de procuration de la comtesse de Marcoussis, notifie que la dame de Marcoussis est propriétaire de l 'ancien fief de Fretay, mouvant du Roy à cause du comté de Montlhéry, représentant 264 arpents de terres labourables et du fief de Fretay, mouvant du Plessis-Sebbeville, qui consiste en plusieurs maisons et 196 arpents. En outre, le fondé de pouvoir précise que le troisième fief de Fretay est toujours mouvant du seigneur d'Orsay et contient 57 arpents de terres avec maisons et jardins.

Notes

(1) Au XIVe siècle, l a seigneurie du Plessis passa dans les mains de Jean Blosset, chambellan du roi Charles VI. Un autre Jean Blosset l'était pareillement sous Charles IX et Henri III. La soeur de ce dernier porta après lui cette terre à Louis de Montberon qu'elle épousa. En 1619 Jean de Montberon, son petit-fils, possédait cette Terre. Elle passa ensuite à Geoffroy de Laigue, conseiller d'État. C'est depuis celui-ci que la terre du Plessis-Pâté a le titre de baronnie. Après lui, François d'Argouges, conseiller d'État et chancelier de la Reine, acquit la baronnie du Plessis-Pâté. Après lui, ses héritiers la vendirent, le 24 mai 1709, à Charles-Louis Kadot, comte de Sebbeville.

(2) Jean II Olivier est le petit-fils du chancelier François Olivier dans les ancêtres étaient Rochelais. Par les alliances ou achats successifs, les Olivier étaient devenus seigneurs de Leuville, du Coudray, de Fretay, de Villemarêchal, du Puiseux-en-France, baron du Homet et de la Rivière. Une des branches cadettes donna les seigneurs de Ballainvilliers.

(3) L'obligation de fidélité entre le vassal et le suzerain reposait sur la prestation de foi et hommage dont l'expression devait être toujours renouvelée à tout changement. Au XVIIe siècle, ce qui avait de l'importance était l'aveu et le dénombrement que le vassal devait en entrant en possession. C'était un acte authentique portant reconnaissance du fief par le vassal et donnant le détail de ce qu'il tenait à ce titre du seigneur dominant.

(4) Le marquis Louis-Auguste de Rieux était le mari de Louise Jeanne d'Illiers, héritière des Balsac d'Entragues. Criblé de dettes, le marquis fut obligé de vendre Marcoussis au prix de 572.000 livres. On dit que presque la totalité de cette somme fut immédiatement versée aux créanciers.

à suivre …

dagnot/chronique23.06.txt · Dernière modification: 2020/11/12 01:35 de bg