Corpus Essonnien

Histoire et patrimoine du département de l'Essonne

Outils pour utilisateurs

Outils du site


dagnot:chronique31.06

Page en chantier


L'église Saint-Jean-Baptiste de Leuville (2)

Chronique du Vieux Marcoussy –Marcoussis————— _——————————_- —- Juin 2009

Atlas de Trudaine (1745).

C. Julien

JP. Dagnot

Cette chronique donne à la seconde partie de l'histoire de l'église Saint-Jean-Baptiste de Leuville-sur-Orge (cant. Arpajon, Essonne).

Les droits honorifiques dans l'église de Leuville

Deux illustres familles ont fortement marqué, de leur passage, l'église de Leuville : • La famille Olivier de Leuville a détenu cette terre pendant 300 ans depuis la donation de Jean Alart de Court-Alary, écuyer, à Jacques Olivier, procureur en Parlement, jusqu'au mariage de l'héritière Antoinette Madeleine Olivier de Leuville avec le marquis de Poyanne. En tant que parlementaires, les seigneurs de Leuville appartenaient à la noblesse de robe. Les plus illustres membres de cette famille sont : le chancelier François Olivier qui servit sous les Valois-Angoulême et mourut en 1560 exilé dans son château de Leuville par une intrigue avec la duchesse de Valentinois (Diane de Poitiers) et le marquis Louis Olivier de Leuville qui en 1650 avait obtenu de Louis XIV que sa terre soit érigée en marquisat. • Le passage de Philippe de Noailles, maréchal de France, duc de Mouchy, marquis d'Arpajon et du Bouchet fut également remarqué à Leuville, terre qu'il acheta en 1751. Il était l'époux de Anne Louise d'Arpajon, dame d'honneur de la reine Marie-Antoinette.

Rappelons que les droits honorifiques dans l'église sont de deux sortes, les droits majeurs (droit de présentation à la cure, les prières nominales, droit d'être nourri des biens de l'église, droit de litre « listræ » ou de ceinture funèbre, le pas à la procession, l'encens « thus », droit de sépulture et de banc dans le chœur «sepultura et sedes in choro» ) et les droits mineurs (pain bénit « panis benedictus », offrande, baiser de Paix « osculum Pacis », eau bénite « aqua benedicta », banc et sépulture dans la nef « sedes in honoratione loco navis ecclesia ») (1).

Quels étaient les droits honorifiques du seigneur de Leuville dans l'église Saint-Jean ?

La réponse à cette question mérite un développement. Il est vrai que Leuville était un fief mouvant du roi à cause de la châtellenie de Montlhéry. C'est bien cette dépendance féodale qui apparaît le 19 juillet 1367 lorsque « Jehan de Brétigny, écuyer, donne aveu au Roy pour sa terre et seigneurie de Leuville mouvante de Montlhéry ». Le seigneur de Leuville est moyen-justicier , la haute justice étant dans les mains du prévôt royal de Montlhéry avec les appels ressortissant aux conseillers du Châtelet de Paris.

Les manuels de droit d'Ancien régime sont volumineux à ce sujet (2). Voilà ce que nous dit Loyseau : « le Patron ou Fondateur et le Haut-Justicier de la paroisse ont seuls droit aux honneurs de l'église, et les autres qui en jouissent, ne les ont que par pure tolérance et possession ». Maréchal prétend que « les droits honorifiques appartiennent au Patron, privativement à tous autres ». Guyot ajoute « celui qui a aumôné le patronage à l'église, même sans réserve, a néanmoins tous les droits honorifiques, ce qu'on appelle Patronage honoraire, à l'exception de la collation de la cure ». Il semble que dans un premier temps, le statut de Leuville correspondait à cette description.

Bien que n'ayant que la moyenne et basse justice, le seigneur de Leuville possédait les honneurs dans l'église de la paroisse où était bâti son manoir, c'étaient les « honneurs du seul vrai seigneur du lieu quand la seigneurie était un arrière-fief du domaine royal ». En absence de patron (l'évêque de Paris) et de haut-justicier (le roi), le seigneur de Leuville s'arrogeait « les grands et les moindres honneurs » bien que ses armes n'étaient ni à la clef de voûte, ni à la maîtresse vitre, ni sur les cloches.

Le 29 mars 1593, gisant au lit malade, Suzanne de Cabannes, dame de Leuville, Ballainvilliers, etc… femme de Jean Olivier, gentilhomme de la Chambre du roi, dicte son testament. Elle désire este inhumée à Saint-Germain l'Auxerrois en l'église cathédrale, donne 50 livres à une douzaine de pauvres de Paris, fonde un obit de dix escus au couvent de Saint-Eutrope pour faire dire et chanter des messes et veut qu'il soit déploier au pourtour du dedans de ladite église de Leuville une ceinture de deuil où il sera par intervalle mis et apposé ses armoiries ou armes . Le 6 décembre suivant, Anthoine Héruy, commissaire et examinateur pour le roy est nommé par noble homme Jehan de Neufville et Hiérosme Lemaistre, exécuteurs du testament de Suzanne de Chabannes, pour veiller aux dispositions de la défunte.

Voici l'armorial de la litre de Leuville « au 1 et 4 d'azur, à six besans d'or , posés 3 , 2 & 1, au chef d'argent , charge d'un lion naissant de sable qui est Olivier ; et au 2 & 3 d'or , à trois bandes de gueules , celle du milieu chargée de trois étoiles d'argent , qui est Noviant » .

La situation de Leuville évolua au tournant du XVIIe siècle, les fils aînés de la famille Olivier sont des officiers proche du Roi. Jean Ier Olivier puis son fils Jean Olivier IIe du nom est qualifié de « gentilhomme ordinaire de la chambre du roi » (3).

Le statut de Leuville changea radicalement en juin 1650. Le seigneur Louis Olivier de Leuville fit ériger cette terre en marquisat. Il obtint des lettres du duc Gaston d'Orléans, seigneur apanagiste de Montlhéry, qui lui permettaient de faire dresser en cette même terre de Leuville et Valorge qui relèvent du comté de Montlhéry. Une haute justice pour la joindre à la moyenne et basse avec ressort des appellations pour le Civil au Châtelet de Paris, et pour le Criminel au Parlement, et autre permission de tenir à Leuville un marché toutes les semaines. Ces lettres furent enregistrées en Parlement le 9 juillet suivant.

Cette promotion donne la qualité de haut justicier au seigneur de Leuville . Désormais, cette famille possédait tous les droits honorifiques dans l'église Saint-Jean « la Haute Justice emporte supériorité, commandement et puissance publique ; qu'ainsi elle est entièrement, et par excellence, domination et seigneurie ». Immédiatement, le marquis de Leuville fait valoir ses droits et commence dès 1655, la construction du caveau des Olivier de Leuville avec la chapelle Saint-Vincent qui devient la chapelle seigneuriale. Le marquis meurt le 5 août 1663 ; une litre ou ceinture funèbre peinte, sur le pourtour intérieur de l'édifice « aux armoiries du marquis Louis Olivier de Leuville, seigneur haut justicier du lieu ». En plusieurs endroits ces armoiries sont très bien conservées et visibles de nos jours.

Mesdames de Leuville

Nous parlerons succinctement des deux bienfaitrices de l'église Saint-Jean connues dans l'Histoire sous le nom de Madame de Leuville . L'une épouse du marquis Louis de Leuville joua un rôle primordial auprès de la reine Anne d'Autriche, l'autre sa bru, veuve du marquis Charles de Leuville vécut à la cour de Versailles.

Madame de Leuville, est Anne Morant qui était, depuis le 23 octobre 1636, l'épouse de Louis Olivier, chevalier, marquis de Leuville, baron de Vair, lieutenant général des armées du roi. Née en 1621, morte le 9 septembre 1698, à l'âge de 79 ans, elle était la fille de Thomas Morant, IIe du nom, chevalier, seigneur et baron du Mesnil Garnier, d'Esterville et de Soulles, conseiller au Grand Conseil, puis trésorier de l'Epargne du Roi et de Jeanne Cauchon de Treslon. Madame de Leuville était la mère de la marquise d'Effiat.

Dans les Historiettes de Tallemant des Réaux, nous lisons « La plus raisonnable action que Bensserade ait faitte de sa vie, ce fut que M. de Chasteauneuf ayant esté fait Garde des sceaux pour la seconde fois, en 1650, il fit en sorte que la pension que Gombaud avoit sur le sceau fust continuée. Il estoit des amys de Madame de Leuville , femme du nepveu du Garde des sceaux, et il la fit agir comme il falloit ; après il escrivit un billet à Gombaud, sans signer, par lequel on l'avertissoit que l'affaire estoit faitte, et qu'il en avoit l'obligation à Ma dame de Leuville , à Madame de Villarseaux sa belle-sœur, à Madame de Chaulnes la vidame, à Madame de Vacelas, et au president de Bellievre, et ne parloit point de luy ». L'abbé Tallemant dit que cela vient de ce qu'un jour il dit à Bensserade que Gombaud faisait cas de sa poésie. L'auteur fait une erreur dans la biographie d'Anne Morant « femme de René Olivier, marquis de L., frère de Madame de Villarseaux, la mère ».

Dans sa lettre du 20 juin 1695 à Mme de Sévigny, Mme de Coulanges donne tous les potins de la Cour et notamment « … J'ai remarqué, comme vous, mon amie, le tems de la mort de notre pauvre Madame de la Fayette. Madame de Quélus se divertit à merveilles chez elle, la Cour ne lui paroît pas un séjour de plaisir ; elle ne quitte plus Madame de Leuville, qui donne tous les jours les plus jolis soupers qu'il est possible. Je ne crois pas le marché de Ménilmontant rompu sans ressources ; et n'en déplaise à Madame de Chaulnes, c'est la plus jolie acquisition que puisse faire M. de Chaulnes. La Maréchale d'Humières se retire aux Carmélites, elle a loué la maison de feue Mademoiselle de Porte ; elle gouverne entièrement le faubourg Saint-Jacques; et ce qu'il y a de plus étonnant, c'est que le P. de la Tour la gouverne. Vous savez que M. de Lauzun a l'appartement de Versailles du Maréchal d'Humières ; il fait faire pour sa femme un collier de diamans de deux cents mille francs. Adieu, ma chère amie… »

Le 15 novembre 1671, la marquise de Sévigné écrit à sa fille « Voilà deux bonnes veuves, Madame de Senneterre et Madame de Leuville : l'une est plus riche que l'autre, mais l'autre est plus jolie que l'une ». Dans une autre lettre à sa fille, Mme de Sévigné écrit « L'Abbé de Pontcarré me mande que le fils de M. Morant, Conseiller d'Etat, est nommé Intendant en Provence; c'est un fort galant homme, dont je crois que vous serez contens : ce Morant est le propre neveu de Madame de Leuville, l'amie de M. de Grignan » (4).

Dans le journal du marquis de Dangeau nous lisons « Mardi 2 juillet 1686, à Versailles. — Le roi alla souper à Marly — Madame de Leuville eut ordre de sortir de Paris et de se retirer à Montbrison en Forez. On prétend que c'est pour avoir aidé à l'évasion d'un huguenot, son parent ».

La seconde personne dénommée Madame de Leuville, est Marguerite de Laigue . Elle était, depuis novembre 1671, veuve de Charles Olivier, chevalier, marquis de Leuville, baron de Rivière, fils d'Anne Morant, qui mourut jeune à l'âge de 22 ans. Née en 1652, morte en 1719, à l'âge de 79 ans, elle était la fille de François de Laigue.

Laissons le soin au célèbre Saint-Simon qui écrivit dans ses mémoires « Mme de Leuville mourut aussi à soixante-sept ans. Son mari, mort très jeune, était frère de la femme d'Effiat, duquel on vient de parler, morte jeune aussi et tous deux sans enfants. Le chancelier Olivier était leur trisaïeul paternel, mort en 1560, dont le père fut premier président du parlement de Paris, après avoir été avocat du roi, comme on parlait alors, c'est-à-dire avocat général, et président à mortier. Ce fut lui qui commença la race, car son père, qui était de Bourgneuf, près de la Rochelle , ne fut jamais que procureur au parlement. Mme de Leuville dont on parle ici était nièce de Laigues, un des importants personnages de la Fronde , qu'on prétendit que la fameuse Mme de Chevreuse avait, à la fin, épousé secrètement. Sa nièce tâcha aussi d'être importante. Elle avait beaucoup d'esprit, de domination, d'intrigue et d'amis qui se rassemblaient chez elle et qui lui donnaient de la considération. C'était une femme qui, sans tenir à rien, eut l'art de se faire compter: elle était riche et médiocrement bonne ».

L'église Saint-Jean au XVIIIe siècle

En 1708, une nouvelle cloche nommée Louise-Marguerite dont le parrain et la marraine étaient le marquis et la marquise Olivier de Leuville, est placée dans le petit clocher. D'un poids de 275 kg , bénie par les curés de Leuville, cette cloche provient des ateliers des fondeurs Claude de la Paix et Bernard du Boys . Voici l'inscription gravée dans le bronze « En l'an 1708, nous avons esté bénite par messire Antoine Fleury prestre curé de Leuville assisté de Jean Chastel ancien curé dudit lieu et nommé Louise Marguerite. Messire Louis Thomas du Bois Olivier Fienne, haut et puissant seigneur, marquis de Leuville et autres lieux, chevalier, grand bailli de Touraine, brigadier des camps et armées du roy et Marguerite de Laigue marquise de Leuville mes parein et mareine. Claude de la Paix et Bernard du Boys nous ont fait ». Elle a été refondue en 1754 par le maître fondeur Joseph Thouvenaux.

En 1710, l'abbé Jean Chastel demanda par testament à être inhumé dans son église. Le 15 mars 1715, un miracle se produit pour une Leuvilloise infirme en l'église de Saint-Germain les Chastres (Arpajon). La veuve Rochefort, femme d'un vigneron de Leuville fait vœux de dire la messe à la gloire de Saint-Corintien. Elle aurait été guérie sur le champ et serait retournée en sa maison de Leuville sans ses potences. Un procès-verbal a été dressé par le tabellion de Leuville en présence de Jean Mauger, témoin, vigneron à Leuville qui a déclaré « ne sçavoir écrire ni signer ». Lors du dénombrement de 1735, la paroisse compte 38 feux (170 habitants environ).

Au milieu du XVIIIe siècle, un miracle est survenu à une femme de Leuville, qui ayant un enfant tout couvert de lèpre se rendit en procession à l'église Saint-Pierre de Brétigny pour un action de grâce sur la tombe d'Anne de Berthevin, dame vertueuse dont on avait trouvé le corps sain et intact après 123 ans. Le miracle eut lieu au retour de la femme dans sa masure de Leuville quand elle appliqua sur le berceau du bébé un linge qu'elle avait présenté à la dame de Brétigny.

Le chœur ajouté à la chapelle primitive au XVIIe siècle.

Dans sa notice sur Saint-Jean de Leuville de 1757, l'abbé Lebeuf nous dit qu'il y avait deux clochers de la manière suivante « cette église a une croisée, à l'un des bouts de laquelle est une chapelle couronnée par une lanterne ou petit clocher différent de celui de la paroisse ».

En 1766, les Noailles devenus seigneurs de Leuville font reconstruire en partie cette église. La construction d'une grille pour fermer la porte du chœur est envisagée en 1768. En 1771, le curé de Leuville veut faire jouer son droit de résignation (droit de choisir son successeur), mais l'archevêque de Paris refuse le visa obtenu en cour de Rome.

L'église Saint-Jean sous la Révolution

En 1790, une procession est organisée à Longpont par les paroissiens de Leuville pour les Rogations en l'honneur de sainte Julienne. Nous savons que plusieurs processions étaient organisées dont celle de la fête patronale et celle qui conduisaient les habitants de quatre paroisses, Nozay et La Ville-du-Bois son annexe, Saint-Pierre de Brétigny, Saint-Filbert de Brétigny et le Plessis-Pâté à Longpont pour y fêter les Rogations et y prendre un repas offert par les moines du prieuré Notre-Dame. La procession des Rogations, pendant trois jours avant l'Ascension, était organisée afin de demander à Dieu de protéger les récoltes et le bétail.

La constitution civile du clergé a été votée le 12 juillet 1790 par l'Assemblée nationale, afin de remplacer le concordat de 1516. Cette réforme transforme les prêtres paroissiaux en « fonctionnaires ecclésiastiques » rétribués par l'État. Les diocèses sont remaniés sur la base d'une cour épiscopale par département. Leuville est placé sous l'autorité de l'évêque de Versailles. Le texte de la prestation de serment était « Je jure d'être fidèle à la Nation, à la Loi et au Roy, et de remplir fidèlement les fonctions qui leur sont déléguées par les lois après d'en demeurer garant et responsable en leur propre et privé ».

Plus tard, après la destitution du Roi, la loi du 15 août 1792, il était requis que les ecclésiastiques renouvellent leur serment de fidélité à la constitution et de prononcer la formule du serment prescrit par ladite loi « Vous jurez d'être fidèle à la Nation et de maintenir de tout votre pouvoir la liberté et l'égalité ou de mourir à votre poste », le dit citoyen ayant la main levée répondait « Je le jure !!».

Le dimanche 6 février 1791 est le jour consacré pour les curés et autres ecclésiastiques « Par les articles 1 er , 2 et 3 du décret de l'Assemblée nationale du 27 septembre dernier et sanctionné par le Roy le 26 décembre suivant et publié dimanche dernier, nous maire, officiers municipaux, procureur de la commune et notables composant le conseil général de ladite commune dûment réunis, convoqués par M. le maire en la manière ordinaire, nous sommes réunis en la salle de l'assemblée de la commune vers les 9 heures et demie du matin et de là nous sommes transportés en corps à l'église paroissiale, où après avoir pris les places qui nous avaient été destinées nous avons entendu la messe solennelle célébrée par Monsieur le curé et à l'issue de la messe, revêtu de sa chasuble et habits sacerdotaux et placés sur le degré du maître autel, ont prêté individuellement en notre présence et en celle des fidèles, le serment civique auquel ils étaient assujettis par l'art. XXXIX du décret du 13 juillet dernier et réglé par les art. XXI et XXXVIII dudit décret du 12 du même mois dans les termes et selon les formules insérées dans les articles 1et et 3 de celui dudit jour 27 septembre sans restriction, et ensuite M. Jacques Henry Gabriel La Perruque , prettre cy-devant chanoine de Linas, aumônier de la Garde nationale de Montlhéry y demeurant, a prêté le même serment dans les termes et selon la formule portée audit art. XI, aussi sans restriction et il a prononcé un discours analogue à cette sainte et auguste cérémonie, dans lequel il a développé le sentiment du patriotisme le plus pur et les principes de la morale et éclairée où il a démontré en peu de mots que la constitution du clergé décrétée par l'Assemblé nationale, loin de donner atteinte à la discipline et l'église, les porte au contraire à son institution primitive, l'on y a remarqué particulièrement les traits suivants. Après avoir en distrait que quoi qu'il ne fut point fonctionnaire public, il se réunit au clergé d pour prêter le serment décrété par l'Assemblé nationale, qu'il n'oublierait jamais que le ministre de l'église étoit l'enfant de la patrie, qu'avant d'être ecclésiastique, il étoit citoyen, à qu'après avoir prescher la soumission à la loy, il étoit de son devoir et de son honneur de donner l'exemple de cette soumission, il a réclamé le sentiment de l'humanité en faveur des fonctionnaires publics qui ont refusé prêter le serment humblement… ».

En 1791, la fabrique de Saint-Jean de Leuville entreprend la construction de la sacristie sur le flanc méridional de la chapelle de la Vierge. Pendant la Révolution on vide les caveaux des seigneurs pour prendre les cercueils de plomb. Joseph Alexis Gautier, curé en 1791, reste prêtre de Leuville pendant tout le temps de la Révolution ayant prêté serment à la constitution civile du clergé à plusieurs reprises. Son ministère dura 40 ans à Leuville. Un rapport établi en l'an X précise que l'église de Leuville est bien tenue alors qu'un projet de fermeture des églises est à l'ordre du jour. Des nombreux travaux sont engagés en l'an XI : réfection des piliers avec du mortier de chaux, réparation des murs du cimetière, de la toiture et du plancher des combles.

L'église de Leuville au XIXe siècle

En 1802, Lucien Corneille, ancien chanoine de Senlis, succède à l'abbé Gautier et devient curé de Leuville. En 1806, des travaux badigeon sont entrepris sur les plafonds et les murs du sanctuaire avec la peinture au dessus du maître-autel. Leuville qui avait perdu son statut de paroisse est officiellement érigé en paroisse en 1807. Des travaux au clocher sont effectués en 1820 « à cause de différents ouragans » qui ont causé des dégâts importants. Faut-il voir le changement d'architecture de la façade dans ces travaux ?

Lors de sa visite de 1837, l'évêque du diocèse de Versailles, juge que l'église de Leuville est mal entretenue, que les livres liturgiques ne sont pas appropriés et qu'il manque du linge sacré. L'abbé Beaumont quitte Leuville en 1846 pour la cure de Yerres. Une enquête est diligentée en 1849 pour évaluer les réparations à effectuer dans la paroisse de Leuville : « le cimetière doit être clos de murs et le presbytère peut être maintenu » écrit le visiteur épiscopal. D'autres gros travaux sont encore menés au XIXe siècle, comme ceux de changement de charpente en 1851. Un procès-verbal mentionne que « la nouvelle charpente trop amplifiée a compromis la stabilité de l'ensemble ».

En 1856, un chemin de croix est acheté chez la maison Gaspart de Paris. En 1860, le curé Lecoq est qualifié “d'associable” parce qu'il veut « être maire, curé et bedeau à la fois ». Il entre en conflit avec l'instituteur laïc « lequel veut concurrencer l'école religieuse dirigée par les sœurs ». Il part en 1866 après un grave conflit avec le maire de Leuville.

En 1870, lors de l'invasion de la France par les Prussiens, le curé sauve la vie à Monsieur Geoffroy qui était prisonnier des occupants. En 1878, un rapport du curé mentionne que la chapelle du château se trouve 35 cm plus élevée que le niveau du chœur. Le conseil de l'église décide de la faire niveler « sachant que 35 personnes fréquentent cette église ».

Ainsi, à la fin du XIXe siècle, nous assistons à une désertion de la pratique religieuse. À cette époque le curé écrit : « Il y a soixante-dix domestiques, employés dans le pays qui nous apportent leurs débauches et leur impiété… ». Puis, nous savons qu'il existe deux confréries : la confrérie Saint-Jean-Baptiste dont tous les hommes font partie, et la confrérie Notre-Dame de Victoire. 300 personnes sont inscrites sur le registre, 20 personnes viennent à la messe le dimanche et un seul homme a fait ses Pâques.

En 1889, un certain Martin fait une notice sur l'église de Leuville avec une description du mobilier. L'abbé Simon est nommé à la cure en 1899. Il y avait à cette époque un nombre considérable de tableaux et de sculptures. En 1914, l'abbé Deutch est le dernier curé permanent de Leuville.

Lors de la séance du 21 mars 1905 sur la loi de séparation de l'Église et de l'État , dans son intervention à la tribune de l'Assemblée nationale, le député Georges Berry dit « …les communes et l'Etat s'empareront des églises et des édifices religieux et, si le Gouvernement qui siégera alors sur ces bancs a les mêmes idées que le Gouvernement actuel, toutes les églises seront fermées, et les prêtres, comme en 1795, seront contraints d'aller dire la messe dans les granges et dans les caves. Ce n'est pas douteux… ». Comme toujours ce qui est excessif est ridicule…

De nos jours, l'intérieur de l'église Saint-Jean-Baptiste de Leuville comprend un mobilier qui date essentiellement du XIXe siècle à l'exception du retable du chœur du XVIIe siècle. Le visiteur peut admirer : • les 14 tableaux composant les stations du chemin de croix qui a été autorisé par Monseigneur Gros en 1856. Ce sont des toiles crées par le peintre Gaspard. • le retable de l'ancienne chapelle seigneuriale du Saint-Sacrement avec un tableau « l'Adoration des Mages », huile sur toile copie de Rubens • une statue de pierre taillée du XVIIe siècle de saint Michel en armure de chevalier avec le dragon terrassé à ses pieds, placée au bas-côté méridional. • une statue de saint Sébastien qui fait pendant à la précédente dans les restes tronqués des nervures de l'ancienne voûte. • une statue de plâtre peint du XIXe siècle de saint Vincent, patron des vignerons. C'est l'œuvre des artistes parisiens, le sculpteur Verreboult et le peintre Raffi. • un tableau de la Nativité, peinture sur toile du XVIIIe siècle d'après Simon Vouet, placé au bas-côté droit sur le premier pilier à gauche (cité par M.F. Martin en 1889 comme ancien retable de l'autel de la nef droite).

Notes

(1) G.-A. Guyot, Observations sur le Droit des Patrons et Seigneurs de Paroisse aux Honneurs dans l'Église , tome VII (chez Saugrain fils, Paris, 1758).

(2) Un des arrêts les plus célèbres en matière de droits honorifiques est l'arrêt Coubertin qui jugea en mars 1727 de la haute justice et du droit de litre dans l'église de Saint-Rémy-les-Chevreuse réclamés par les Dames de Saint-Cyr, le sieur de Fredy, possesseur du fief de Coubertin et M. de Vaugien, seigneur d'un simple fief.

(3) La fonction de valet de chambre telle que nous la connaissons sous Louis XIV ne fut pas toujours exercée par des officiers portant ce nom : ils furent appelés tour à tour valets de chambre, chambellans ou gentilshommes de la chambre. Leur fonction, toujours occupée par des hommes nobles, consistait essentiellement à habiller et à déshabiller le Roi. Henri IV eut trois premiers gentilshommes de la chambre comme son prédécesseur; et ayant besoin d'économie, il ne remplit les charges de gentilshommes ordinaires de sa chambre que de dix personnes, dont cinq eurent douze cents écus d'appointements, les autres eurent les gages ordinaires.

(4) Mme de Sévigné a la dent très dure avec Mme de Senneterre qu'elle appelle la Mitte et dit « qu'elle tortille autour des courtisans et n'obtient rien ».

dagnot/chronique31.06.txt · Dernière modification: 2020/11/12 03:50 de bg